— Vermine ! Reviens ici !

La voix résonnait comme un écho dans la rue. Un marchand venait de sortir de sa bicoque, furieux et cirant, agitant ses mains en l'air. Il regardait de partout la petite voleuse qui venait de lui dérober de la nourriture. Il interpellait les passants, cherchant à savoir s'ils avaient vu dans qu'elle direction cette satané mioche était partie.
La voix résonnait comme un écho dans la rue. Une enfant venait de sortir d'une bicoque, le cœur battant vite, les bras chargés de paquets de bonbons, de pains et de morceaux de fromages. Elle se frayait un passage entre les passants, se faufilant telle une anguille, jusqu'à atteindre plus loin une petite ruelle. Au détour de ce chemin, elle escalada la façade d'un bâtiment pour se retrouver sur le toit - heureusement plat.
La haut, en hauteur, à l'abri de son poursuivant, caché des regards, elle soupira en se laissant tomber les fesses sur le sol. Elle expirait et inspirait fortement, tachant de retrouver son souffle.

Une fois son pouls normal, elle se laissa tomber complètement en arrière, se retrouvant allongée sur la bâtissait. Elle regardait en l'air, les nuages gris qui commençaient à parsemer le bleu clair du ciel. Une averse se préparait.
Elle attrapa une miche de pain et la porta directement à sa bouche, venant en croquer une bien grande bouchée. Quelques miettes tombèrent sur le haut de son t-shirt, et d'autres se logèrent sur le coin de ses lèvres.

— Je rêve d'une bonne soupe bien chaude...

Se disait-elle à elle même, presque dans un murmure. Voilà à quoi étaient réduit ses repas, depuis un bon moment déjà. Du pain, du fromage, parfois un petit morceau de viande. Tout ce qu'elle arrivait à dégoter, chaparder, mendier. Et pourtant avant, ce n'était pas comme ça. Dans ses souvenirs de jeunesse, lorsqu'elle était vraiment toute petite, elle mangeait à sa faim, et ses repas étaient variés. Ses parents étaient heureux, et ils l'aimaient. Ensemble ils étaient une petite famille comblée. Et puis sa mère est morte de maladie. Et puis son père à changé. Et puis Poppy s'est retrouvé seule.
Olaf Tonks, son père, était un mineur. Mains crasseuses et abîmées, tient gris, vêtements déchirés et recousus. Un vrai de vrai. Le peu de pièces qu'il rapportait, il les dépensait directement au bar du coin ou en filles faciles. Poppy était donc bien obligée de se débrouiller par elle-même si elle voulait manger. C'était d'ailleurs surement à cause de son alimentation que l'enfant n'était pas bien épaisse.

Une goutte d'eau tomba sur son nez. Une seconde sur sa joue. Et pendant qu'elle ressentait la fraîcheur de la douce pluie s'abattre doucement sur la ville, Poppy rêvait du jour ou elle quitterait Ora pour se rendre à la capitale. Il était hors de question pour elle qu'elle moisisse dans ce trou. Elle voyait les choses en grand, et elle voulait partir, loin. Loin de cette ville ou elle s'ennuyait. Loin de son père qui ne se souvenait que très rarement qu'il avait une fille. Loin de sa vie, qui n'était pas faite pour elle. Elle songeant à tout ça, la jeune fille se demandait si un jour elle serait heureuse. Si un jour elle rencontrerait une personne qui la prendrait sous son aile, qui s'occuperait d'elle comme on s'occupe d'un enfant.
Poppy avait grandit bien vite, confrontée à la dure réalité de la vie, à une mère décédée, à un père ignorant. L'enfance, c'était une chose si lointaine pour elle.