Past ★ Il faut goûter son sang.
(noctae) Deux ans en arrière.Le goût d'une liberté. D'un air frais retrouvé. Il y a ce léger vent qui fait onduler la crinière rougeâtre. Perchée sur des talons, tu erres. Un regard vide pour habiller tes traits. Fatigué. Un soupir amer passe tes lèvres alors que tu avances lentement. Bousculant des murs qui ne demandent rien. Qui se trouve malheureusement sur ton chemin. Il est bientôt l'heure. De retrouver la scène. De reprendre vie l'espace d'un instant.
Une seconde suspendue.
En oubliant ce qui fut.
Ce qui est arrivé.Il y a un peu plus d'une semaine, tu te retrouvais là. Étendue sur le sol dans ton propre sang. Il gisait sur les pavés putrides de cette ruelle dégueulasse. Se répandant sous toi alors que tu les voyais. Les étoiles. Elles brillaient alors que tu te demandais vaguement si tu allais finir là. Si c'était ainsi que tu voyais la fin. La fin de cette vie. Dans un souvenir morne et brutal.Mais C'est le destin qui en a décidé autrement. Ou le hasard. Le hasard d'avoir croisé cette personne.
D'avoir vu ce regard.
De l'avoir accroché.
Pour l'étreindre désespérément.Bien qu'elle ait pris le temps de s'occuper de toi. De te porter jusqu'à l'hôpital le plus proche, tu n'y es déjà plus. Tu as fui. Parce que c'est ce qu'il y a de plus simple. Pour échapper aux démons. À ses yeux, à lui. Il aurait pu revenir. L'air de rien. Et tu ne pouvais pas accepter cette possibilité. Parce que tu ne cesses de te demander. Qu'est-ce qui aurait été pour le mieux ? Tu te demandes, oui, alors que tu parcoures anxieusement les visages aux alentours. Dans la peur.
C'est pour cela que tu erres seule, loin des autres.
Tanguant légèrement, tu te diriges jusqu'au bar. Ils ne t'attendent sûrement pas, mais tu comptes bien travailler. Tu peux chanter. Même dans cet état second, tu peux encore le faire.
Tu peux laisser entendre ta voix.
La laisser se libérer.
Jusqu'à hurler.Tu espères que cela te fera du bien. De pouvoir te laisser aller. Et c'est la seule pensée que tu as en poussant la porte d'entrée. Il y a un regard qui se pose sur toi. Il t'observe, surpris.
« Je vais bien. » c'est tout ce que tu lui dis. Avant que sa voix ne résonne. Le patron s'inquiète, tu l’aperçois au fond de ses yeux grisâtres alors que tu ressors pour prendre l'air. Tu te sens nauséeuse. Pâle. Fébrile. La chaleur se répand douloureusement. Instinctivement, tu viens poser une main sur la plaie. C'est chaud.
Liquide également.
Le sang glisse.
Entre tes doigts.« Merde... c'est vraiment d'la merde ces points... » tu ne sais pas comment. En marchant. En tirant sur ton bras. En t'étirant une seconde. Tu ne sais pas. L'inattention d'une femme éreintée. Il ne reste que le sang qui coule entre tes doigts. Doucement alors que ton vêtement noir commence à s'imprégner. Alors que le bas de ton ventre découvert commence à changer de couleur. Tu viens t'appuyer contre un mur. À l'abri de la porte, loin des regards curieux et des clients. Cette faiblesse, tu ne veux pas qu'ils la voient. Qu'ils puissent l'observer.
Et tu te demandes.
Ce que tu peux faire maintenant.L'incompréhension. Les questions. La colère. L'agitation. Et la peur. Ils se bousculent alors que tu restes là. Incapable de bouger.