Les tambours raisonnent, écho au sang qui pulse doucement contre ses tempes, emplissant son esprit embrumé par les vapeurs d'encens. Ses pieds nus s'enfoncent dans le sable frais qui borde le cercle de cérémonie, alors que les premières étoiles s'allument une par une dans le ciel nocturne, sous la lueur bienveillante de Mahama qui baigne doucement les lieux.

Et Seren se rappelle, alors qu'il s'avance à pas mesurés à l'intérieur du cercle, sa silhouette nimbée de la lumière du feu émis par les torches rituelles. Ses foulées se font amples, ses étoffes se gonflant autour de lui comme une mer en colère. Ses pairs entament les chants, profonds, primitifs, familiers, de leurs voix profondes qui semblent se mêler en une seule et même entité.

Et il se rappelle, alors qu'un conteur entame la légende de la création de Gahïa Li, sur le rythme des tambours, au son des dizaines de voix qui s'élèvent désormais pour former un chœur primal.

« ─ Que pourrais-tu bien souhaiter, petit être ? avait grondé Pepuere à la fin de son conte, un air amusé au fond du regard. La liberté d'être ce que je souhaite, grand Gardien, avait cérémonieusement répondu Seren, qui reprenait difficilement son souffle après sa course effrénée dans la forêt, à sa poursuite. Il sut que sa réponse avait satisfait l'être mythique au moment où celui ci gronda un rire qui secoua les environs. J'ai apprécié ton histoire. Ne te fait plus battre à la course par quiconque d'autre que moi, avait-il malicieusement ajouté avant de disparaître aussi vite qu'il s'était présenté à lui, ne laissant dans son sillage que l'adolescent nimbé de lumière, stupéfait. »

Et Seren voltige, son épaisse parure comme des ailes dans son dos, alors que les clochettes à ses chevilles teintent au rythme des tambours de la tribu. La voix grave du conteur s'élève toujours, ponctué par la musique qui enveloppait désormais la forêt et les claquements de mains des innombrables spectateurs. Le danseur a l'impression de croiser un regard bleuté, qui disparaît bien vite à la faveur des arbres. Cela ne l'empêche pas de se fondre dans un pas de danse qui rappelle étrangement une révérence respectueuse, un brin espiègle, sans doute, alors que l'orateur reprend son récit.

« Par Navara, je promets de protéger notre peuple. Par les Gardiens, je promets de transmettre nos traditions et d'élever les jeunes navarites vers la compréhension du monde et le respect de la terre de nos ancêtres. Au nom de la famille de l'Ours Blanc, Matoskah, je m'engage à ne jamais trahir ma parole, mon peuple ou mes vœux. »

Les yeux clairs de Seren s'attardent un instant sur les natifs qui observent le spectacle cérémoniel, attentifs et émerveillés. Tous différents à leur façon, mais tous unis sous la lueur de Mahama.

Un seul et même peuple.
Ensemble.