Ses bras s’étiraient vers le ciel alors que sa bouche s’ouvrait en grand, lâchant un long « Aah ». Ses yeux restèrent fermés, face à ses mains qui vinrent les frotter. La fatigue s’était emparée de son corps, depuis de longues heures déjà. Et, son rituel ne cessait d’être exécuté. Si au début, de nombreuses minutes séparaient les répétitions, celle-ci se rapprochait et dévoilait l’usure de la demoiselle.

Or, son travail ne s’achevait encore. Son regard se leva. Les rayons de soleil traversaient l’espèce couverture formée par la cime des arbres mais elle n’arriva à distinguer son exact position et se dit tout simplement que le zénith devait approcher. Arrivée avant l’aube, la marchande s’était laissée surprendre par le changement de luminosité, peut-être trop plongée dans son travail.


Cela n’était pas aussi simple. Elle embellissait la réalité afin de créer la motivation qui lui permettrait d’achever sa mission. Or, Nyree le savait. Aujourd’hui, son seul lit serait le sol, avec en guise de couverture, les feuilles qui le couvraient. Ni sa première expérience, ni la dernière. Ranunga se trouvait plutôt loin de la forêt, ainsi, lui fallait parfois improviser.


Seul ce prénom sortit de sa bouche, sous la surprise qu’il provoqua. Les yeux écarquillés de la petite, se posèrent sur lui. Elle n’arrivait pas vraiment à croire à sa présence en ces lieux. Pourtant, ce n’était la première fois qu’il s’y croisait. Une nouvelle joie s’empara de son être, balayant et usurpant la place du précédent envahisseur, la fatigue.


Nyree se baissa, attrapa son panier où se trouvait déjà quelques spécimens afin de pas l’oublier au cas où, l’homme voudrait reprendre son chemin. La brune s’était décidé à l’accompagner. De plus, sa présence la divertirait aussi le temps de finir sa tâche.

La petite native écoutait avec attention les paroles de son interlocuteur, toute sans exception et ce, sans décrocher. Il fallait bien avouer, elle avait l’habitude de discuter avec lui. Et, à ses yeux, ou plutôt, à ses oreilles, il était impossible de trop parler. Ceux qui affirmaient le contraire n’étaient autre que des rabats-joies asociales.

Ainsi, dans sa quête de champignons, ce fut une véritable délivrance pour Nyree de croiser son meilleur ami, de pouvoir discuter avec lui. Sa présence avait déjà repoussé son ennui et sa fatigue bien loin du corps de la demoiselle qui, désormais, se sentait revivre.

« Les arbres sont bavards aujourd’hui ? Il t’aide à trouver ce que tu recherches ? »

Demanda t-elle par pure curiosité. Le pouvoir d’Azazel était des plus intriguant. Puis, il lui posa une question sur sa récolte. Nyree baissa le regard sur son panier et haussa les épaules. Disons que les champignons ne se battaient pas pour entrer dans le panier de Nyree.

« Beaucoup ont été écrasé. Faut que je change de coin pour les planter. Le problème, c’est que je peux pas deviner non plus où les chasseurs et les autres gens se baladent.. Et si je mettais d’énormes panneaux avec écrit en gros, ATTENTION CHAMPIGNON A NE PAS ÉCRASER ? Peut-être que les gens feraient enfin attention ! »

Voilà une option bien étrange pour Nyree mais possiblement viable. Malgré tout, quelques questions se posaient encore. Avait-elle au moins le droit de planter un panneau dans la forêt de Puepuere ? A moins de se renseigner auprès d’une autorité religieuse, la réponse lui échapperait à jamais.

« Sinon, je campe auprès de mes champignons et j’assomme tout ce qui les écrase. »

Celle-ci était plutôt violente. Et, Navara savait que la petite brune ne possédait assez de force pour l’exécuter. Or, l’idée de camper près de ses cultures pouvait être une solution, à quelques détails près comme le fait qu’elle ne pourrait sans doute plus rentrer chez elle et vivrait à jamais dans la forêt. Enfin, la native serait obligée de sortir pour le noho, mais.. Ça se résumerait à ça. Malheureusement, elle aimait bien trop son domicile pour l’abandonner.  

«Mais, sinon, j’ai trouvé deux spécimens intéressants et en excellentes états ! »

La vendeuse finit son long monologue sur une note joyeuse. Elle pourrait passer des heures à parler de champignons sans jamais sans lasser. Or, une nouvelle pensée traversa son esprit, lui faisant oublier une seconde ses petites êtres chapeaux ronds. Sa tête se tourna à gauche puis à droite. Ses sourcils se froncèrent, un petit moue apparut sur le visage de Nyree.

« Tu aurais pas vu Pokala en te baladant ? » Puis, elle marqua une pause, se demandant si Azazel l’avait déjà rencontré et dans le doute, la native rajouta. « Un hibou, du moins à peu près grand comme ça. »

Elle finit sa phrase en faisant un geste avec ses mains pour indiquer la taille de la bestiole. Nyree songea ensuite qu’avec le jour, il s’était peut-être posé sur un arbre pour se reposer. Mais bon, si le blond l’avait aperçu, cela réduirait tout de même ses nouvelles inquiétudes.