Lorsque notre chère Emily ouvre sa librairie, le soleil est à peine levé et les oiseaux chantent. Elle salue habituellement ses voisins marchands, ne croisant pas les travailleurs réguliers qui eux sont encore dans les bras de Morphée. Il faisait frais ce matin. Baloo, son chat, était assis sur le rebord de la grande baie vitrée, ronronnant. Ce chat la suivait partout, et en une année, il était devenu son allié. Recueilli alors qu'il n'avait pas plus de trois semaines, Emily s'était occupée de ce petit être poilu comme si sa vie en dépendait. Et il lui rendait bien.

Donc, Emily venait donc d'ouvrir sa librairie. Enfin, pas vraiment. En effet, elle avait laissé cette petite pancarte sur la porte vitrée qui disait que "la maison prenait des vacances". La boutique était vieille, très vieille. Elle avait toujours été tenue par des humains, et avait un cachet très "authentique", avec de belles poutres de bois, une cloche en or près de la porte pour tinter lorsque l'on entre. La grande baie vitrée donnait sur toute une rangée de livres, anciens, sur la religion ou les animaux. Des livres sur l'histoire, les langues, les civilisations passées et présentes. Sur deux étages, un bel escalier en colimaçon en bois massif mène le visiteur vers des étagères pleines de romans à l'eau de rose, d'aventure, de parodies satiriques et bien d'autres. C'est un paradis, celui d'Emily du moins. Un havre de calme, de sérénité. Il n'y a qu'elle, son chat et ses livres. Elle ne fait que rarement des livraisons car n'aime pas laisser sa boutique seule, mais elle gère son petit business à son rythme. Même si elle ne dirait pas non à un peu d'aide des fois, ou de compagnie autre que Baloo, sa vie lui plaît.
Cependant, un événement vint troubler son petit calme et son quotidien : le panneau de contrôle pour le chauffage et pour le courant vient de lâcher. Sa caisse enregistreuse aussi. Tout a lâché d'un coup, la mettant dans une position délicate. Alors, après conseil d'une voisine, elle récupéra le nom d'une jeune femme pouvant l'aider avec ses réparations. Elle ne s'y connaît pas, alors toute aide extérieure est la bienvenue.

Cela fait une semaine que la librairie est fermée pour cause de problème technique.

La réparatrice qui doit venir s'appelle Keridwen. Keridwen Caldin. Tout ce qu'elle savait d'elle c'est qu'elle était une éléctro-mécanicienne douée. Et ça lui faisait plaisir de pouvoir travailler avec une autre femme, d'abord, mais aussi une jeune femme bourrée de talent et prometteuse. D'après sa voisine, elle était enthousiaste, sérieuse et amicale. Juste ce dont elle avait besoin ! Emily l'attend donc devant sa boutique à l'heure convenue, excitée et impatiente, son chat se frottant à elle et semblant aussi impatient de voir cette inconnue.

A l’arrivée de l’électromécanicienne, Emily afficha un grand sourire ravi. Elle avait l’air cordiale, à la disposition du client, adorable et puis surtout motivée. C’était rare avec la jeune génération des travailleurs de Ranunga, cette motivation sans nom qui pouvait se lire à peine le professionnel entré. Emily recherchait cette qualité chez la personne qui allait lui sauver la mise, et elle n’était point déçue. La jeune femme serra donc la main de cette Keri, la prenant fermement dans la sienne.

Emily – « Enchantée Keri. Appelez-moi Emily, nous semblons avoir sensiblement le même âge. Et vous êtes… » elle se tourna vers le jeune homme accompagnant Keridwen, « Azel ? Enchantée aussi ! »

Ce jeune homme, Emily ne savait pas qu’il serait du voyage. Elle avait un peu de mal avec la gent masculine et se sentit rougir en voyant son grand sourire. Elle se perdit aussi dans ses grands yeux, puis revint à elle quand son chat se frotta à sa jambe comme pour la ramener à la réalité.

Emily – « Hm, err… Donc ! Je vous remercie avant tout pour vous être déplacés si vite. J’ai eu un réel contre temps et je suis actuellement dans une position délicate. Mais suivez-moi à l’intérieur, je vais vous montrer ce qui ne va pas. »

Emily ouvrit la grande porte de bois vitrée, posant sa fine main sur la poignée ornée de dorures. La cloche tinta et elle fit entrer après elle les deux professionnels. Son chat aussi, Baloo, ne se fit pas prier pour entrer et vite aller se poser sur le comptoir.

La libraire se permit d’ouvrir tous les volets, pousser les lourds rideaux et ouvrir une fenêtre ou deux pour faire entrer la bonne odeur du parterre de fleur et des jardinières emplies de pousses de saison.

Elle aimait l’odeur des fleurs roses, violettes, bleues et blanches, l’odeur de la belle saison ; elle aimait entendre les oiseaux chanter, les clients parler, les enfants rire ; elle aimait voir le soleil briller. Il brillait, ça c’est sûr, un peu trop même. Et était là un des problèmes majeurs : le temps se réchauffe, le soleil tape fort sur la grand place et sur la grande fontaine en face de sa librairie. Ses ouvrages, du moins les plus vieux et les plus fragiles, ont besoin d’une température constante et régulée au degrés près pour ne pas risquer d’abîmer quoique ce soit. Les archives de la ville concernant la culture et les arts, qu’elle conserve aussi dans l’autre partie  plus privative de la librairie, doivent être conservées à une température précise avec un taux d’humidité acté. En dessous de ce taux d’humidité, de cette température, les matériaux peuvent se dessécher, Au-dessus, les moisissures peuvent se développer. Dans les deux cas, la qualité du document est altérée grandement et il y a un risque de perte dudit document. Aussi, la température est importante pour le bâtiment même, pour les boiseries, les dorures et autres illustrations et dessins conservés dans la librairie. Elle se permit donc de leur montrer tout d’abord son panneau de régulation de chauffage et de contrôle de l’humidité, ainsi que les appareils qui venaient de lâcher, leur expliquant l’importance de ces dispositifs. Ils étaient assez… vieux, voire obsolètes, et quand elle a reprit l’endroit, elle n’a jamais pensé a les faire réviser. Tout le système devait être revu voire changé. C’était primordial pour la bonne continuation de sa librairie.

Emily – « …Et comme je vous le disais donc, l’atmosphère dans laquelle tous mes documents sont conservés est très importante. Je garde des documents officiels, donc, en soi, je ne peux me permettre qu’ils soient impactés, et ils prévoient qu’il fera de plus en plus chaud. Je ne m’y connais vraiment pas, et vu l’ancienneté du système et des appareillages, l’on m’a dit qu’il fallait que je vous montre tout ça… Vous pensez pouvoir y faire quelque chose ? » demanda la jeune brune, l’air inquiet.